Depuis la création du Grand Paris, le projet tant institutionnel que de transport est devenu une source d’inspiration et de redimensionnement du terrain de jeu pour les architectes parisiens de naissance ou d’adoption.
Par Fabienne Proux, rédactrice en chef déléguée au journal du Grand Paris
Métropolitaine, intermodale, ferroviaire, urbaine… Si l’idée duGrand Paris revêt des significations différentes selon lesarchitectes, elle a au moins unpoint commun qui est d’avoir donné un nouvel élan à leurs pratiques et à leur manière d’appréhender les projets parisiens. Pour l’agence Triptyque, créée au Brésil, le retour en France de deux de ses associés a été lié aux appels à projets urbains innovants, Réinventer Paris en 2015 et Inventons la Métropole du Grand Paris en 2016 pour leur première édition. Une « réflexion enthousiasmante » vue du Brésil qui a mis « tout le monde autour de la table de façon transversale (secteur public, promoteurs, architectes, urbaniste, etc.) pour réfléchir ensemble à des stratégies de projets », explique Guillaume Sibaud, associé de l’agence Triptyque. « Ces programmes très ambitieux ont apporté une vision concertée et holistique sur la problématique et la dynamique métropolitaines », précise-t-il, qui va au-delà des transports en « comprenant une réflexion globale sur l’ensemble des territoires et les multicentralités ».
En créant « des points de rayonnement », ces appels à projets ont contribué à la lutte contre le « monocentralisme parisien ». Une notion relativement nouvelle qui a effectivement changé la donne et rompu avec un certain entre soi parisien néfaste. « évoquer uniquement Paris aujourd’hui a une connotation un peu négative », confirme Massimo Mattiussi, directeur du développement de Scau architecture. « Le Grand Paris ouvre. Tous les acteurs avaient besoin que Paris devienne le grand Paris, car la ville s’était sclérosée. » Une ouverture également sociale favorisant les échanges.
Un Grand Paris générateur de projets inédits
Dès lors, l’architecte du Grand Paris contribue « à l’accélération du rééquilibrage des grandes fonctions urbaines », ajoute de son côté Fabienne Couvert, directrice de l’architecture d’Arep, traditionnellement organisées avec à l’est le logement, au nord l’industrie, au sud l’agroalimentaire et à l’ouest les quartiers d’affaires. Il est aussi l’accélérateur de la transition vers une métropole neutre en carbone en rendant les gares attractives et interconnectées, de manière à faciliter les transports et l’intermodalité les plus décarbonés possibles.
Et ce n’est pas rien pour un Grand Paris qui évoque à Marc Franco, directeur de l’agence parisienne de Coldefy basée à Lille, l’idée « d’embouteillage », ce qui requiert par conséquent de savoir développer des maillages. Mais pour une agence à la fois provinciale et internationale, être implantée dans le Grand Paris est aussi l’opportunité de pouvoir rayonner sur le territoire national. Et se rapprocher de la gouvernance, des maîtres d’ouvrage et des politiques dont les idées pour désengorger les axes parisiens et métropolitains, « nous nourrissent et alimentent notre réflexion sur la fabrication de la ville et de ces nouveaux usages, comment favoriser l’idée de désengorger cette urbanité à l’échelle d’un bâtiment mais également celle plus vaste de l’urbanisme avec la nécessité d’échapper à une vie frénétique, l’aspiration au calme et la soif de nature », développe Marc Franco.
Le Grand Paris se présente dès lors comme un générateur de projets inédits, par exemple les bâtiments emblématiques prévus dans les programmes connexes autour des gares, et avec un plus un haut niveau d’exigence. « Cela impose d’être vertueux à tous les stades », constate Massimo Mattiussi. « Participer en tant qu’agence à construire le Grand Paris est une belle aventure, mais aussi une responsabilité. » En commentant cette notion d’exigence, Fabienne Couvert reconnaît que « le fait de participer à la réalisation du Grand Paris Express offre, comme dans tout projet de transports qui induisent des transformations urbaines, un “formidable terrain d’application” à ses équipes ».
« Travailler avec des coachs et des conseillers en communication »
Guillaume Sibaud a aussi vérifié ce surcroit d’exigence lors de la consultation pour l’écoquartier de la gare de Cachan à l’issue de laquelle son agence n’a pas été sélectionnée. « Le niveau de la compétition était vraiment élevé », témoigne-t-il. Au final, ce degré d’exigence et cette nouvelle façon d’aborder les projets permettent aux architectes grands-parisiens d’être plus pertinents sur d’autres territoires et de bénéficier du rayonnement du Grand Paris. Le fait d’avoir été lauréat d’IMGP 1 (Ecotone à Arcueil avec la Compagnie de Phalsbourg) et de Réinventer Paris 2 (Institut Eastman dans le 13e à Paris avec le même promoteur) mais surtout de C40/Reinventing Cities (MKNO avec CAAU, NODI, Promoval) a ainsi permis à Triptyque de travailler sur d’autres territoires dont Toulouse. « Nous avions l’impression de participer à certaines consultations comme représentants des architectes du Grand Paris », confie même Guillaume Sibaud. Mais pour être à la hauteur et s’adapter aux nouveaux modes de concours, il a fallu pour ces architectes s’entourer de compétences élargies (graphistes, designers, consultants en usages ou en approches environnementales) pour monter les dossiers et même travailler avec des coachs et des conseillers en communication pour arriver à présenter un projet en 20 minutes. Une autre prouesse des architectes du Grand Paris.
« Le fait de participer à la réalisation du Grand Paris express offre, comme dans tout projet de transports qui induisent des transformations urbaines, un “formidable terrain d’application” à ses équipes. »
Fabienne Couvert, directrice de l’architecture d’Arep
«Le niveau de la compétition était vraiment élevé. (...) Nous avions l’impression de participer à certaines consultations comme représentantsdes architectes du Grand Paris. »
Guillaume Sibaud, associé de l’agence Triptyque
« Participer en tant qu’agence à construire le Grand Paris est une belle aventure, mais aussi une responsabilité. »
Massimo Mattiussi, directeur du développement de Scau architecture
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